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COLLOQUE SUR LE PATRIMOINE CULTUREL IMMATÉRIEL À ORAN : Taos Amrouche, cantatrice et courroie mémorielle



COLLOQUE SUR LE PATRIMOINE CULTUREL IMMATÉRIEL À ORAN : Taos Amrouche, cantatrice et courroie mémorielle
L’Université Oran 2 a organisé, durant deux jours, un colloque sur la sauvegarde, la revalorisation et la transmission du patrimoine culturel immatériel algérien en collaboration avec le Cema, l’Onda et l’université de Cergy-Pontoise.

Taos Amrouche (1913-1976), écrivaine et cantatrice, a été au centre d’un colloque qui s’est tenu, ces deux derniers jours à Oran, pour son rôle dans la transmission de la mémoire berbère à travers les contes et poèmes ancestraux qu’elle a recueillis de la bouche de sa mère, Fadhma Aït Mansour. “Non seulement, elle les a recueillis mais elle les a magnifiés et universalisés grâce à son style de chant et sa voix”, a estimé Fadhila Sidi Saïd Boutouchent, de l’université de Tizi Ouzou, dans une communication intitulée “Taos Amrouche, cantatrice/créatrice de chants berbères”. L’intervenante s’est également intéressée aux costumes et bijoux portés par Taos Amrouche lors de ses représentations, autre élément du patrimoine culturel berbère que la cantatrice mettait en valeur. “Cet habit peut être considéré comme un personnage à part entière investi d’une valeur symbolique qui complète le sens des chants de la cantatrice (…)”, a soutenu Fadhila Sidi Saïd Boutouchent en soulignant que Taos Amrouche, dont le frère, Jean-El Mouhoub, a traduit au français les chants rituels berbères, a toujours “travaillé très dur” à la préservation du patrimoine kabyle. Le travail de sauvegarde de la mémoire kabyle a été entamé dès 1939 par Taos, son frère et leur mère, Fadhma Aït Mansour, véritable détentrice du trésor familial des chants berbères, a rappelé Brahimi Denise, de l’université de Lyon, dans son intervention sous le titre “Taos Amrouche et les chants berbères de Kabylie : les conditions d’une sauvegarde”. Dans son ouvrage autobiographique, Fadhma a écrit : “(...) Cette époque oppressante de l'avant-guerre avait été éclairée par une œuvre qui nous tint en haleine pendant des mois, Taos, Jean et moi : la fixation en langue française des chants berbères hérités des ancêtres qui m'avaient permis de supporter l'exil et de bercer la douleur”. Taos supportera sa vie durant le poids du legs ancestral : “Taos a été seule à soutenir ce travail de sauvegarde (de 1939 à 1976, ndlr) qui est une histoire d’une vie (…) Cela a été son histoire à elle et elle ne l’a jamais regretté”, a affirmé Brahimi Denise qui a consacré deux livres à la cantatrice berbère : Taos Amrouche, romancière : document (1995) et Grandeur de Taos Amrouche (2012). Pour Brahimi Denise, la préservation d’un patrimoine ne signifie par le renfermement sur soi-même mais bien l’ouverture sur les autres, sur le monde. D’où les multiples voyages que Taos a effectués au Maroc, Espagne, France, Italie, Allemagne, Sénégal où elle porta fièrement la parole berbère. Mais, cet engagement, Taos l’a assumé dans la douleur et le déchirement découlant de son statut “d’hybride” : française et berbère, incapable de s’intégrer aux autres, demeurant toujours en marge. De certains de ses livres à forte coloration autobiographique, se dégage “la lutte qu’elle se livre pour ne sacrifier aucune parcelle d’elle-même malgré la douleur et la souffrance que cela provoque”, analyse Benammar Khadidja, de l’université de Mostaganem, dans sa communication intitulée “Taos Amrouche, de l’hybridité identitaire à l’hybridité artistique.” C’est dire à quel point Taos Amrouche s’est investie dans la mission de diffusion du patrimoine de ses ancêtres berbères. Le colloque sur la sauvegarde, la revalorisation et la transmission du patrimoine culturel immatériel algérien a été organisé par le laboratoire de recherche Ladicil et l’Université Oran 2 en collaboration avec le Cema, l’Onda et l’université de Cergy-Pontoise.


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