Urgence signalée et inexpliquée

Le communiqué de la présidence de la République qui est tombé en fin de matinée, hier, pour annoncer les changements à la tête de certaines institutions financières et entreprises économiques publiques, ordonnés par le président Bouteflika, sans les détails sur les institutions, entreprises et les personnes concernées, a vite donné lieu sur les sites d'information en continu et dans les bureaux et couloirs des sièges des grandes administrations publiques aux spéculations habituelles à la fois sur les noms des gestionnaires remerciés, sur ceux de leurs remplaçants désignés et sur les motifs du départ des uns et de l'arrivée des autres. L'instruction du chef de l'Etat donnée aux tutelles de mettre en ?uvre ces changements «sans délais», une urgence «signalée», comme on dit, mais inexpliquée, a constitué, très certainement, un motif supplémentaire de discussions sur les tenants et aboutissants de cette décision.Comme pour le remaniement ministériel, l'effet de surprise a joué à plein. La longévité, souvent au-delà de l'âge de la retraite, de certains dirigeants d'entreprises et institutions a laissé l'impression qu'ils étaient inamovibles et que s'ils étaient poussés à quitter leurs postes, c'est parce qu'ils auraient commis une maladresse mal perçue en haut lieu. Cette opinion dominante en matière de nomination aux postes supérieurs exclut l'idée d'un changement opéré normalement selon des critères universels comme l'évaluation individuelle d'un dirigeant d'entreprise par son Conseil d'administration ou la mise en ?uvre d'une nouvelle stratégie exigeant d'autres compétences, ou toute autre raison objective. Il faudra attendre soit un communiqué officiel soit des indiscrétions «calculées » pour connaître les motifs du chamboulement introduit dans les institutions et entreprises concernées par les changements de «patrons». Il ne faut pas se leurrer, la part de clientélisme dans les nominations à ce niveau existe partout dans le monde, associée aux jeux d'intérêt et à la nécessité d'avoir des personnes de confiance à ces postes.