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Une des icônes de la natation à Skikda




Une des icônes de la natation à Skikda
C'est un jeune homme de 89 ans qui nous accueille. Il a suffi de le voir, assis, là, en face, pour se laisser imprégner de l'aura qu'il dégage. L'allure racée, le verbe facile, le ton modéré et à aucun moment il n'usera d'emphase pour revenir sur une vie, faite pourtant de compétitions, de records et de gloire. De vécu aussi.Tel est Hammoudi Boufafa, le champion. Lui, que le tout Skikda évoque encore comme un étendard de fierté d'une génération comme on n'en fait plus. Boufafa Hammoudi est né en 1926 sur l'interminable rue Ali Abdennour.De son enfance il garde, ancrée, l'image de Mohamed, ce père contremaître docker dans une Skikda où les Algériens vivaient alors au grès des offrandes du port et de sa Méditerranée. Le contacte vivier du père avec la mer influera sur le vécu du petit Hammoudi qui, enfant déjà, nageait aisément, entre deux chalands à la «Marinelle». Comme tous les skikdis de l'époque, le petit Hammoudi rejoint l'école indigène El Farabi, ex-Anatole France où il ne tarda pas à se faire distinguer. «Il maitrisait la langue française et l'anglais aussi.C'était un surdoué», témoigne un de ses amis d'enfance.Pour revenir à son parcours sportif, Boufafa reconnaît qu'il était physiologiquement prédestiné à l'athlétisme. «J'étais un bon sprinteur.Enfant, je courais les 100 m plat en 11secondes ?et j'ai même battu le fameux Mokrane Oudjani sur cette distance. Je ne sais pas ce qui m'avait pris pour aller faire de la natation. C'était peut-être l'influence de mon frère qui, un jour, m'emmena avec lui à la piscine Ben Mhidi, ex- Jeanne d'Arc».Et voilà que Boufafa, l'enfant, découvre cette piscine qui venait juste d'être inaugurée. C'était en 1936. Haut comme trois pommes, il est vite propulsé dans l'arène des grands et ne tarde pas à faire parler de lui. A 11 déjà, il brusque le monde de la natation en remportant les 50 m papillon dans la catégorie minimes. En 1938, il est sacré champion départemental.Ses aînés qu'étaient Benslimane et Guermech prennent note et deux années après, ils l'incorporent à leur équipe pour nager les quatre-fois 100 m. Surprise ! Ils sont sacrés champions ! Et la fabuleuse histoire de Boufafa allait se poursuivre «A 14 ans je figurais déjà dans l'équipe du Racing Club Philippevillois(RCP) qui réussira à battre le record d'Afrique du nord du 4 fois nage libre.Guermeche avait alors 20 ans, Benslimane 18 ans. J'étais le plus jeune du groupe, d'ailleurs j'arrivais à peine aux hanches de Guermeche, meilleur nageur de skikdi, voire d'Afrique à cette époque avant la venue de l'inégalable Benslimane en 1938».En 1949, à la piscine de Ben Mhidi toujours, Boufafa, battra encore le record d'Afrique du Nord de 5x50 m avec les Guermeche, Sid Said, Taboni et Maurice, puis en 1951, il battra un autre record nord-africain, le 10 x 100 m avec Teffahi Youcef, Lebbouz Mohamed et Chorfi Ahcene, dit Scoula. De 1946 à 1953, il a régné en maître sur la natation à Skikda «Il était le meilleur nageur de Skikda, sans concurrence aucune», reconnaissent ses amis.La JSMS, juste pour le ?Nif'!En 1946 juste après la reprise de compétitions, suspendues depuis 1940 suite aux évènements de la seconde guerre mondiale, Boufafa, Benslimane et Guermech décident de rejoindre le club skikidi, la JSMS qui venait de créer une section de natation. «On l'a fait juste pour le «nif». Pour déclarer notre attachement à notre monde d'algériens.On a ainsi quitté le RCP pour signer à la JSMP, l'actuelle JSMS. Cette aventure ne durera pas longtemps car à la JSMS on s'intéressait beaucoup plus au football et la section de natation allait vite être dissoute. On est alors revenu au RCP». A la veille du déclenchement de la Révolution, Boufafa comme l'ensemble des nageurs algériens cesseront toute activité sportive jusqu'à l'indépendance.Il créé, en 1963, avec d'anciens nageurs tels les Chorfi Mustapha dit Kaâoua, Guermeche, Said Sid, Sarroub dit Tikla, Bellambri, Bouarroudjle, le Cercle Nautique de Skikda (CNS). Quant aux nageurs, il y avait Sid Salah, le meilleur de la génération post-indépendance en plus d'une section féminine avec les filles Brouri, Benzernaji et d'autres encore? « Avec ces jeunes talents on a réussi à tenir quelques années seulement mais devant le manque de moyens, on s'est retrouvés obligés d'arrêter». Mais Boufafa n'a pas arrêté pour autant.A ce jour, ce jeune homme de 89 ans continue encore de nager, en hiver comme en été. La mer, pour lui, reste une éternelle source de jouvence. On y plongeant, il revit certainement, à chaque brasse, le sourire de son père, les rires de ses amis et le souvenir d'une vie entière dédiée au labeur et à l'honneur. Respect Monsieur !



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