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Les irréductibles de la culture




Les irréductibles de la culture
Mohamed RahmaniCar, les manifestations culturelles, elles aussi, ne sont plus ce qu'elles étaient, du fait de la désaffection généralisée à la choseculturelle. En effet, rares sont les festivals, les expositions ou les manifestations culturelles de moindre importance organisés régulièrement pour faire accroire à une vie culturelle.Le désintérêt des jeunes générations s'explique par le fait que l'on n'a pas su semer cette graine initiatrice qu'on aurait pu arroser de contes, de textes littéraires, de visites dans les musées, de galeries d'art, d'excursions ou sorties d'études sur les sites archéologiques. Cette graine n'a donc pas pu croître et grandir, elle est restée en l'état quelques temps avant de disparaître dans les plis de la mémoire. Sevré de culture dans son propre pays qui, pourtant, a enfanté par le passé d'illustres personnages, hommes de lettres, dramaturges, et tragédiens, musiciens, chanteurs et chanteuses, peintres et sculpteurs dont le talent a dépassé nos frontières, l'Algérien d'aujourd'hui n'a d'autre alternative qu'embrasser d'autres cultures, orientales ou occidentales, des cultures qui prennent racine ailleurs et en déphasage total avec sa réalité.Cependant, certains rescapés, irréductibles de la culture, s'accrochent et résistent contre vents et marées pour arroser ce désert culturel et le fertiliser par des ?uvres qui, hélas, ne trouvent niassistance ni prise en charge. Le cas de Benlabidi Abdelaziz, plus connu sous le nom de Aziez, est édifiant. Natif deSouk Ahras, employé de la Commune, ce sculpteur sur bois, autodidacte amoureux de l'art a redonné vie à de grands hommes sous la forme de statuettes qu'il a ciselées de ses mains expertes. «J'ai toujours aimé sculpter, je n'ai pas fait l'école des Beaux-arts, j'aurais bien aimé y aller mais ma condition ne me l'a pas permis. Quand je commence à travailler je ne sais pas, au départ, ce que je vais réaliser exactement. Mes mains me guident et ce n'est qu'au bout de quelques temps que les traits prennent forme, je ne fais qu'affiner et polir. L'inspiration n'a pas d'heure, parfois c'est au milieu de la nuit que je me lève pour travailler une sculpture», nous confie-t-il. N'est-ce pas là la définition faite de l'artiste 'À la question de savoir si des professionnels ou une structure de la direction de la culture lui ont apporté une aide quelconque, il nous dira que lesprofessionnels de cette expression artistique sont rares et vivent à Alger ou à Oran et qu'il n'a pas les moyens de les contacter, sauf lors de rencontres àl'occasion de quelque exposition. «Pour ce qui est de la direction de la culture, hormis les semaines culturelles organisées dans les autres villes du pays dans le cadre des échanges entre wilayas où l'on rencontre d'autres artistes, il n'y a aucune forme d'assistance ou de promotion de cet art qui est en voie d'extinction en Algérie», nous répondra-t-il.Pour Djahid Dhouibia, calligrapheprofessionnel dont les travaux sontexclusivement réalisés à la main et dont les caractères sont reconnaissables entre mille sur les enseignes des boutiques, il n'y a ni assistance ni aide du côté des structures dépendant de la direction de la culture. «C'est tout juste si on nous reconnaît la qualité de calligraphe, on essaye de vivre de notre art sans plus», nous dit-il ajoutant que cet art est lui aussi en train de disparaître du fait qu'il n'y a pas de relève. Les jeunes générations, qu'Internet a détournées, ne s'y intéressent pas du tout.Dans une des maisons de jeunes que nous avons visitées, nous avons rencontré un jeune artiste, peintre de son état, un jeune talent en herbe qui ne demande qu'à être encadré et pris en charge. Ses tableaux accrochés aux murs de la maison de jeunes ou posés à même le sol dans une sorte de réduit périclitent attendant que quelque mécène s'y intéresse.«J'ai exposé mes travaux un peu partout, nous dira-t-il, et à chaque fois je me dis que cette fois ce sera la bonne, il y aura bien quelqu'un qui s'intéressera à ce que je fais. Mais j'ai remarqué que cesmanifestations étaient organisées juste pour meubler une commémoration de quelque événement et donc on est là pour la figuration, sans plus.»Côté prise en charge des artistesamateurs dans tous les domaines, ce n'est pas le Pérou. Les jeunes talents seretrouvent seuls à se débrouiller dans un environnement qui n'est pas favorable, pour ne pas dire hostile, à la culture. Des talents qui sont tués dans l'?uf faute de prise en charge alors qu'on dépense des milliards pour organiser des festivals dédiés aux autres cultures. Pour la culture nationale, vous repasserez. M. R.


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