Algérie - 08- La guerre de libération



le vieillard et l’âne roux
– Saïd Bahmed, dit DDA Saa, le naïf des Bahmed, un homme, je-m’en-foutiste, un gros garçon amorphe et acariâtre.

Le temps où il allait aux champs à tout moment, tout en sachant qu’il n’y était pas autorisé, quelquefois en traversant normalement le barrage de l’armée, d’autres fois en le contournant, afin de rejoindre son verger avec son âne de couleur rousse, pour s’adonner à son activité.
Dda Saïd était bien visible, sur son bourricot, à partir de la tourelle, le poste de garde, située à « Iharkan », actuelle maison des Abderahmane. Elle dominait tout le village du côté sud, et le vaste maquis jusqu’à l’horizon lointain.
Ce personnage, bizarre ; un givré de la tête, pour les uns, un bouffon et un fada pour les autres, il mettait tout le monde en effroi et nul au village ne comprenait quelque chose à l’attitude et le manège étrange du vieillard.
Le débridé, s’en fichait éperdument, autant, pour son âne qui n’en avait rien à braire, il envoyait tout le monde au diable et en premier lieu la soldatesque française et son administration auxquels il faisait de discrets pieds de nez à chaque passage.

Les villageois avaient beau essayer de le ramener à la raison, afin de cesser de défier les militaires, du moins le convaincre de changer d’itinéraire, où de se désolidariser de son âne, roux, pour qu’il ne le prenne plus avec lui aux champs, à ces paroles, le vieillard n’avait point d’oreille, il n’écoutait que sa tête et ce que lui dictait sa conscience.

Chaque jour, il frôlait la mort un peu plus, en traversant le barrage sans se soucier un seul instant de la présence militaire, jusqu’à ce que, son fils excédé, et affolé, l’approcha :

— « Écoute, père, par ta façon d’agir, tu défis les militaires, tu n’es guère à l’abri d’une mauvaise surprise, avec ton âne, tu es une cible facile, les soldats peuvent te tirer dessus, à n’importe quel moment.
Sois raisonnable, et évite de te rendre aux champs, en dehors des jours autorisés ».

D’un ton négligeant, et trainant Dda Saa, répondit :

— « Ne t’en fais pas mon fils, ils ne me voient pas ! »

Le fils, un peu toqué par une telle réponse :

- « Comment ; çà ! Ils ne te voient pas ? Lui répond-il avec intonation, et ton âne et sa couleur éclatante, il trahit ta présence, et c’est tellement évident que vous paraissez comme un nez au milieu de la face. »

— Dda Saa s’empresse de calmer son fils :

— « Ne t’en fais pas mon fils, sache qu’à chaque fois que je suis là-bas, je m’en remets à Dieu. Je récite toujours, un verset du Coran », qui dit :(sourate ya Sin).
— « Nous les avons enfermés entre deux murs, d’un voile, nous les avons enveloppés, devenus aveugles, ils ne voient pas ».

Ce qui est étonnant, voire extraordinaire, c’est que Dda Saïd n’avait jamais été inquiété.
C’est toujours lui, durant la révolution, sur le chemin du retour, vers son domicile, Dda Saa fit la rencontre d’un groupe d’hommes armés, de peur d’être tombé sur un groupe d’assimilés, il leur tint à peu près ce langage :

— « De visages, vous êtes des frères, de cœur, Dieu seul le sait ! »

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