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La construction de l'hôpital de 240 lits de Boumerdès à la traîne depuis dix ans


La construction de l'hôpital de 240 lits de Boumerdès à la traîne depuis dix ans
Plus de dix ans de retard et ce n'est pas encore fini. Inscrit en 2006, le projet de l'hôpital de 240 lits de Boumerdès risque de ne jamais voir le jour.Les démarches entreprises jusque-là pour sa concrétisation ont donné lieu à un scandale qui n'a pas encore révélé tous ses secrets. Ce projet, tant attendu par la population locale, n'est qu'un ratage de plus qui traduit les errements et les manquements du système de santé d'un pays où les hauts dirigeants continuent de se soigner à l'étranger. Le coût du projet en question a presque triplé, atteignant 3300 millions de dinars.Entamés en février 2014, les travaux de réalisation sont à l'arrêt au niveau des fondations depuis février dernier en raison «de l'incompétence des uns, la négligence préméditée des autres et la prédominance des intérêts de clans au détriment de la santé des habitants de la région». Boumerdès serait aujourd'hui l'un des rares chefs-lieux de wilaya du pays qui n'est pas encore doté d'un hôpital digne de ce nom. En décembre 2014, le désormais ex-wali avait eu un malaise cardiaque, mais il s'est fait ausculter au CHU de Tizi Ouzou puis dans un hôpital. Le projet de l'hôpital a été confié dans un premier temps à une entreprise portugaise (Abrantina) en mars 2011.Mais elle s'est retirée deux ans plus tard à cause des retards enregistrés pour l'approbation du marché par la commission nationale et le refus du maître de l'ouvrage d'actualiser les prix. Le marché a été confié par la suite en décembre 2013 à l'entreprise Italienne CGF (Construzion Generali SPA). Cependant, cette dernière a brillé, selon des sources au fait du dossier, par une violation flagrante de certaines clauses du marché. Outre le recours à la sous-traitance, ladite entreprise n'a pas mobilisé de grands moyens matériels et humains sur le chantier, comme mentionné dans les contrats, afin d'achever le projet dans les délais, c'est-à-dire en juin 2015.Des études pour le mieux disantDepuis 2010, pas moins de trois ministres se sont déplacés sur le site abritant le chantier, sis à la sortie de la ville de Boumerdès, mais ils n'ont rien pu faire pour débloquer la situation. Même Abdelmalek Boudiaf y a effectué une halte le 28 juin dernier. Le ministre de la Santé n'était pas venu pour relancer les travaux, mais pour «dégager» le bureau d'études et de suivi Berag Ziane. Ce BET privé algérien a obtenu le concours d'architecture du projet en décembre 2008 pour un montant de 70 millions de dinars, loin devant un BET sud-coréen qui avait soumissionné pour 180 millions de dinars. Mais il n'a pas été invité à assister à la visite du ministre. Son gérant, Ziane Hafidou, a fait ses études aux Etat-Unis et cumule des dizaines d'années d'expérience comme architecte.M. Boudiaf lui avait reproché d'avoir mal fait les études, pourtant approuvées par une commission nationale en 2011 puis modifiées sur demande du maître d'ouvrage. Or, la réalité est toute autre. Le BET de M. Ziane a été relevé pour «avoir dénoncé le bricolage et évité la dilapidation de l'argent public». La preuve : il a été remplacé cinq jours plus tard par Bertho, un bureau d'étude de Haddad. Ce dernier était classé comme étant le mieux disant suite à une soumission portant sur la modification des plans de l'hôpital. Bertho a obtenu le marché pour un montant de plus de 31 millions de dinars.La résiliation du contrat avec le premier BET semble avoir été préparée bien avant puisqu'il dérangeait beaucoup d'intérêts dans l'affaire. Il a même sommé l'entreprise Italienne de démolir les fondations du bloc H en raison de la mauvaise qualité des travaux. Comme il l'a mise en demeure de couvrir les vides des fondations avec le remblai qui y a été soutiré. Alors que l'entreprise Italienne a tout fait pour acheter du ballast dont le coût reviendrait à plus de 170 millions de dinars pour le Trésor public. «On m'a dégagé car je ne voulais pas marcher dans leurs combines et je n'ai pas laissé l'entreprise de réalisation faire ce qu'elle veut», explique-t-il.Dilapidation de l'argent publicMême si elle n'a pas respecté ses engagements, l'entreprise Italienne n'a jamais été iniquité par les responsables du maître d'ouvrage. Selon nos sources, CGF a placé deux grues sur chantier alors qu'elle devait y mobiliser quatre camions rétrochargeurs, huit bétonnières, un bulldozer, une centrale de production de béton, un niveleur motorgrader et un compacteur cylindre, etc. Elle s'est engagée à ramener aussi un architecte comme chef de projet, quatre ingénieurs et cinq conducteurs de travaux, mais au final elle n'a fait venir qu'un architecte, a-t-on précisé dans des PV de chantier. «A un certain moment, c'était un métreur vérificateur algérien qui était notre interlocuteur.En sus de cela, l'entreprise en question n'a réalisé aucun grand hôpital, que ce soit en Italie ou ailleurs», s'indigne Ramdane Dichou, expert en génie civil et ancien directeur technique au CTC. C'est lui qui était chargé par le BET Berag de suivre les travaux de la structure. Selon lui, mêmes les terrassements ont été effectués par des sous-traitants. «Les fondations qu'on a démolies ont été coulées avec du béton qu'ils (les Italiens, ndlr) avaient acheté auprès d'une entreprise algérienne de la région. Ce sont les analyses du laboratoire qui ont prouvé que ce n'était pas du bon béton, pas moi», affirme-t-il.A présent, les responsables de CGF ont encaissé 95 millions de dinars, dont 26 millions de dinars ont été transférés à l'étranger. Alors que la loi interdit le payement d'entreprises étrangères en devises en cas de recours à la sous-traitance. Outre ce problème, l'entreprise italienne obtiendra 10% en plus du prix du marché, soit l'équivalent de 300 millions de dinars, en raison du maintient de l'article relatif aux délais d'exécution du contrat.Une somme qui pourrait servir pour la construction de dix salles de soins ou trois lycées. Les responsables qui ont omis de remédier à ce détail lors de la signature du contrat sont passibles de poursuites judiciaires pour dilapidation de biens publics. Si l'Algérie met 10 ans pour réaliser les fondations d'une simple infrastructure de 240 lits, qu'en sera-t-il alors des cinq grands hôpitaux annoncés en grande pompe à travers le pays '




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