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Entre légende et réalité




Entre légende et réalité
Un roi du Soudan, après avoir envahi la province de l'Ouest à la tête d'armées innombrables, vint mettre le siège devant Tlemcen. La résistance des habitants s'étant beaucoup prolongée, le camp des assiégeants ne tarda pas à devenir une ville véritable et très grande qui, nécessairement, dut avoir sa mosquée. Dès que le sultan se fut décidé à l'élever, il fit appel aux hommes les plus distingués en fait de construction. Il s'en présenta deux ; l'un juif et l'autre musulman, qui vivement se disputèrent l'entreprise. L'examen de leurs plans ayant démontré une parfaite égalité de savoir et d'habileté chez les deux concurrents, le roi du Soudan se trouvait fort embarrassé. Mais à la fin, il eut une idée lumineuse ; il décida que l'Arabe serait chargé de la partie intérieure du minaret, tandis que le Juif s'occuperait de la face opposée. De la lutte merveilleuse de talent qui s'établit entre les deux architectes, il résulta un monument élevé, hardi, superbe, la plus merveilleuse des mosquées arabes. La mosquée terminée, elle fut inaugurée en grande pompe, et par tout le monde il ne fut bruit que du magnifique monument élevé par les deux architectes. Le roi du Soudan les fit tous deux appeler devant lui. « La mosquée que vous avez construite, dit-il, est si belle, que je ne sais trop comment vous récompenser. Cependant, voici un amoncellement de bourses toutes remplies d'or, ce sera la part du musulman. Quant à toi, chien d'infidèle, je devrais t'arracher la vie pour avoir de tes pieds souillé notre lieu de prière. Mais, comme je suis content de ton travail, je me bornerai à t'enfermer au haut du minaret. Seulement, tu devras t'arranger pour ne plus y être quand la nuit commencera à étendre son voile ; ou, par Dieu, si je t'y trouve, ce sera fait de toi ! » Le juif fut conduit dans sa prison méditant tristement sur l'ingratitude des souverains. Mais comme c'était un homme ingénieux que les plus grands périls n'effrayaient point, il ne se laissa pas abattre et se fit apporter des fines planchettes, des cordons de soie et quelques outils. En peu d'heures, il eut fabriqué une paire d'ailes qu'il s'ajusta sur le corps. Puis à l'instant précis où le soleil disparaissait derrière les montagnes de l'Ouest, il se précipita du haut du minaret. Malheureusement, il avait mis trop de précipitation dans son travail, ses ailes se rompirent et il alla se briser le crâne dans le vallon voisin, c'est-à-dire au pied des Rochers de Lalla Setti. Sa mort fut si prompte qu'à peine il eut le temps de maudire le roi. Mais ce fut assez ; à son imprécation finale, la terre se mit à trembler, la foudre sillonna la nue et tomba avec fracas sur la partie du minaret construite par le juif.Mohamed Medjahdi (Recueilli en 1859 du savant El Hadj Sadok, de Tlemcen, par M. le lieutenant Guiter.)


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