Algérie - Sedrata (Isedraten), site archéologique (W. Ouargla)

Détail d'un panneau de stuc de Sedrata conservé au Musée de Ouargla


Détail d'un panneau de stuc de Sedrata conservé au Musée de Ouargla


Les stucs de Sedrata (Ouargla, Algérie). Perspectives d’étude

Les conditions de genèse de la ville de Sedrata, située aux confins sahariens de l’Algérie actuelle, demandent encore à être précisées, car l’on ne peut se satisfaire, sans preuve archéologique, des seules traditions en faisant une fondation des populations ibadites de Tahert fuyant la destruction de leur capitale par les Fatimides. De la même façon, le moment de son abandon ne coïncide pas nécessairement avec l’émergence de la pentapole du Mzab ni avec celle de Ouargla comme « nouveau » centre régional (les relations avec celle-ci étant trop anciennes et trop complexes pour cela). Quoiqu’il en soit, l’hypothèse la plus couramment admise est que la ville fut florissante entre le Xe et le début du XIIIe siècle.
Ses ruines, presque totalement ensevelies sous les dunes, sont connues des explorateurs et des savants occidentaux depuis la fin du XIXe siècle et ont fortement frappé l’imagination. Les maisons, une fois dégagées des sables révélaient une exceptionnelle décoration de stucs aux motifs géométriques très caractéristiques ; de stuc ou plutôt de timchent, si on suit la dénomination locale de ce matériau particulier.
Les fouilles de H. Tarry (1882), de P. Blanchet (1898), de M. Faucher (1941-1942) et surtout de M. Van Berchem (1951-1956) ont permis la récolte de fragments hors contexte stratigraphique et le démontage de nombreux panneaux muraux. Quelques-uns sont conservés au musée de Ouargla, mais la plupart ont été dispersés dans les musées d’Alger et dans une moindre mesure de Paris (Louvre, Quai Branly). Seule une minorité est actuellement localisable et ce sont les pièces que l’on retrouve périodiquement dans les catalogues des expositions d’art islamique. Outre les observations succinctes du début du siècle dernier, réalisées par H. Saladin ou G. Marçais, la seule étude scientifique qui leur ait été consacrée est un article très descriptif de M. Van Berchem, dans lequel cette archéologue ne prend en compte qu’une partie de ses propres découvertes.
Dans le cadre du programme de recherche « Maghribadites », dirigé par Cyrille Aillet (U. de Lyon 2, CIHAM-UMR 5648), la Fondation Max Van Berchem (Genève) nous a autorisés la publication des archives laissées par M. Van Berchem, en particulier ses notes de fouilles et un important fonds photographique en majeure partie inédit. C’est à partir de ces clichés que nous reprenons l’étude systématique des décors de stuc de la capitale ibadite. Cette étude suppose l’élaboration d’un catalogue des motifs et des compositions qui en résultent, ainsi qu’une réévaluation point par point des références stylistiques de comparaison auxquelles il a été recouru jusqu’à présent. Si certaines pistes considérées comme sûres (par exemple un héritage tardo-antique transmis au travers de l’artisanat du bois) le semblent maintenant beaucoup moins, les arguments manquent toujours pour expliquer l’importance pondérale, dans les décors de Sedrata, de thèmes moyen-orientaux (principalement mésopotamiens) a priori sensiblement plus anciens. Ces solutions de continuité constituent un problème historique de fond, qui ne pourrait être complètement résolu qu’à partir de données archéologiques fiables et en particulier de datations physiques menées sur les niveaux d’occupation des habitats concernés.
Ce sont les grandes lignes de la réflexion que nous menons sur les stucs de Sedrata, avec ses difficultés et ses premiers résultats, que nous souhaitons exposer au sein du séminaire du programme REMAI organisé à l’Alhambra de Grenade.

Patrice Cressier et Sophie Gilotte (CIHAM-UMR 5648, CNRS, Lyon)



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