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Biographie de Ferhat Abbas
Enfance et éducation

Il est né dans le village de Chahna, à 10 km au sud de Taher (dans l'actuel wilaya de Jijel), le 24 août 1899, dans une famille paysanne kabyle[1] de 12 enfants. Fils de caïd, son père est Saïd Ben Ahmed Abbas et sa mère Maga bint Ali. Sa famille originaire de la petite Kabylie, a du quitter la région après l'échec de la révolte menée en 1871 par Mohamed El Mokrani[1]. Le grand père est alors chassé de ses terres par les autorités françaises et reconduit à la condition de fellah. Condamné à être ouvrier-agricole, il descend des Hauts-plateaux pour se rendre sur la côte.

Entrée à l'école à l'age de dix ans, Ferhat Abbas fait ses études primaires à Jijel et, bon élève, il est envoyé en 1914 faire ses études secondaires à Philippeville (actuelle Skikda). De 1921 à 1924, il fait son service militaire et commence déjà à écrire des articles pour différents journaux sous le pseudonyme de Kamel Abencejares[2]. Étudiant en pharmacie à la faculté d’Alger de 1924 à 1933, il devient le promoteur de l’Amicale des étudiants musulmans d’Afrique du Nord, dont il est vice-président en 1926-1927, puis président de 1927 à 1931, date à laquelle il transforme l'amicale en association. Il est également élu vice-président de l'UNEF lors du Congrès d'Alger de 1930.

Lutte contre l'idéologie coloniale

Ferhat Abbas est d'abord favorable à la politique d'assimilation avec un maintien du statut personnel, il milite activement au Mouvement de la Jeunesse Algérienne, qui réclame l’égalité des droits dans le cadre de la souveraineté française.

En 1931, il publie le livre « Le Jeune Algérien », regroupant notamment ses articles écrits dans les années 1920, et dont la thèse se rapporte à la lutte contre la colonisation pour assurer l'entente entre les Français et musulmans, dénonce notamment 100 ans de colonisation française, il y est donc question également d'« algérianité », objet de convoitise des colons, d'État Algérien et d'Islam : « Nous sommes chez nous. Nous ne pouvons aller ailleurs. C’est cette terre qui a nourri nos ancêtres, c’est cette terre qui nourrira nos enfants. Libres ou esclaves, elle nous appartient, nous lui appartenons et elle ne voudra pas nous laisser périr. L’Algérie ne peut vivre sans nous. Nous ne pouvons vivre sans elle. Celui qui rêve à notre avenir comme à celui des Peaux-Rouges d’Amérique se trompe. Ce sont les Arabo-berbères qui ont fixé, il y a quatorze siècles, le destin de l’Algérie. Ce destin ne pourra pas demain s’accomplir sans eux »[3].

Diplômé docteur en pharmacie en 1933, il s’établit à Sétif où il devient rapidement une importante figure politique en devenant conseiller général en 1934, conseiller municipal en 1935 puis délégué financier. Il adhère à la « Fédération des élus des musulmans du département de Constantine » en tant que journaliste au sein de son organe de presse, l'hebdomadaire L’Entente franco-musulmane (communément appelé L’Entente), et se fait très tôt remarquer par son président le docteur Bendjelloul qui le promeut, en 1937, rédacteur en chef du journal.
Plus radical dans son combat et dans ses revendications, dénonçant notamment le « code de l'indigénat », il fonde son propre parti en 1938, l’Union populaire algérienne. L'Entente devient alors une véritable tribune politique pour Ferhat Abbas[4].


Vers la cause nationaliste

Engagé volontaire dans l’armée française en 1939, déçu par le régime de Pétain, la Seconde guerre mondiale a mis un terme à ces espoirs d'« égalité dans le cadre d’une souveraineté française », le convainquant que le colonialisme était « une entreprise raciale de domination et d'exploitation » dans laquelle même les élites républicaines françaises les plus éclairées étaient entièrement impliquées[5].

Après le débarquement allié (voir Opération Torch), Ferhat Abbas profite de la nouvelle audience que donne le gouvernement provisoire de la République française (GPRF) aux Algériens, et publie, le 10 février 1943, un manifeste demandant un nouveau statut pour l’Algérie : le « Manifeste du peuple algérien »[6], suivi d'un additif en mai, un « Projet de réformes faisant suite au Manifeste du Peuple algérien » faisant notamment allusion à une nation algérienne. Le projet est alors soumis à la « Commission des réformes économiques et sociales musulmanes » tout juste créée par le gouverneur général Peyrouton. Mais son successeur, le général Georges Catroux, bloque le projet et rejette les initiatives prises par Ferhat Abbas qui est, de septembre à décembre, assigné à résidence à In Salah par le général de Gaulle[7].

Le 14 mars 1944 il crée l’association des Amis du manifeste de la liberté (AML) soutenu par le cheikh Brahimi de l'Association des oulémas et Messali Hadj. En septembre 1944, il crée l’hebdomadaire Égalité (avec pour sous-titre Égalité des hommes - Égalité des races - Égalité des peuples)[8]. Au lendemain des émeutes de Sétif de mai 1945, tenu pour responsable, il est arrêté et l'AML est dissoute. Libéré en 1946, Ferhat Abbas fonde l’Union démocratique du manifeste algérien (UDMA). En juin, le parti obtient 11 des 13 sièges du deuxième collège à la seconde Assemblée constituante et Ferhat Abbas est élu député de Sétif.

Combat indépendantiste

Après le refus à deux reprises de son projet sur le statut de l'Algérie, il démissionne de l'assemblée en 1947. Il durcit alors ses positions, l’hebdomadaire l’Égalité devient, en février 1948, Égalité - République Algérienne puis République Algérienne en juin de la même année[8]. Alors qu'il y annonce dès 1953 une rupture imminente et définitive[9], le Front de libération nationale (FLN) lance le 1er novembre 1954 les premières actions armées[10] et marque le début de la « révolution algérienne ».

Il rejoint, d'abord secrètement, en mai 1955 le FLN, après plusieurs rencontres avec Abane Ramdane et Amar Ouamrane, puis annonce publiquement son ralliement et la dissolution officielle de l'UDMA lors d'une conférence de presse au Caire le 25 avril 1956. Dès le 20 août 1956, à l'issue du congrès de la Soummam, il devient membre titulaire du CNRA (Conseil national de la révolution algérienne), puis entre au CCE (Comité de coordination et d'exécution) en 1957. Ferhat Abbas devient ensuite président du premier Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) à sa création le 19 septembre 1958, puis du second GPRA, élu par le CNRA en janvier 1960. En août 1961, considéré comme n’étant pas assez ferme face au gouvernement français[7], il est écarté du GPRA et remplacé par Ben Youcef Ben Khedda.

À l'indépendance de l'État algérien, lors de la « crise de l’été 1962 »[11], opposant le GPRA de Ben Khedda et le bureau politique du FLN, Ferhat Abbas rallie le 16 juillet les partisans de Ben Bella, tout en désapprouvant le principe de parti unique retenu par le programme du congrès de Tripoli[12]. Il succède à Abderrahmane Farès, président de l'Exécutif provisoire, et devient le président, élu par 155 voix contre 36 blancs ou nuls, de la première assemblée nationale constituante (ANC) fixée le 20 septembre. Le 25 septembre 1962, il proclame la naissance de la République algérienne démocratique et populaire[13].

Militant démocrate

Il quitte ses fonctions le 15 septembre 1963 suite à son profond désaccord avec la politique de « soviétisation » de l'Algérie par Ahmed Ben Bella dénonçant « son aventurisme et son gauchisme effréné »[14] qui l'exclura du FLN et l'emprisonnera à Adrar dans le Sahara la même année. Il est libéré en mai 1965, à la veille du putsch du 19 juin par Houari Boumédiène.

Retiré de la vie politique, mais toujours militant et fervent démocrate, il rédige avec Ben Youcef Ben Khedda, Hocine Lahouel, ex-secrétaire général du PPA-MTLD, et Mohamed Kheireddine, ex-membre du CNRA, en mars 1976, un « Appel au peuple algérien »[15], réclamant des mesures urgentes de démocratisation et dénonçant « le pouvoir personnel » et la Charte Nationale élaborée par Boumédiène. Il est alors une nouvelle fois assigné à résidence jusqu’au 13 juin 1978. En 1980, il publie ses mémoires dans Autopsie d’une guerre puis, en 1984, dans L’Indépendance confisquée, virulente dénonciation de la corruption et de la bureaucratie, qui régnait alors en Algérie, engendraient par les régimes successifs de Ben Bella et Boumédiène[7]. Il est décoré au nom du président alors en exercice, Chadli Bendjedid, le 30 octobre 1984, de la médaille du résistant dans sa villa du quartier de Kouba. Ferhat Abbas est mort à Alger le 24 décembre 1985. Il est enterré au Carré des martyrs du cimetière El Alia d'Alger.


Œuvres

Le Jeune Algérien. La Jeune Parque, Paris, 1931 [réédition Garnier, 1981. Le Jeune Algérien : 1930. De la colonie vers la province. (suivie de) Rapport au maréchal Pétain : Avril 1941. (ISBN 2705003584)].
J’accuse l’Europe. Libération, Alger, 1944.
Guerre et révolution I : La nuit coloniale. Julliard, Paris, 1962.
Autopsie d'une guerre : L’aurore. Garnier, Paris, 1980 (ISBN 2705002901).
L'indépendance confisquée. Flammarion, Paris, 1984 (ISBN 2080647180).
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