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Bande frontalière Ouest



Bande frontalière Ouest
Au moins 30 hectares de terres arables actées, appartenant à des Algériens, sont exploitées par des agriculteurs marocains au su et au vu des responsables de notre pays.Au lieu-dit Ouled Mellouk, tribu des Béni Ouassine, les familles algériennes, Bouhassoune et Mezouar, pères et fils (Rachid, Bekkaï, Mohamed et Djamel) dénoncent «l'expropriation» d'une superficie de 10 hectares de terres fertiles par des Marocains ayant pignon sur rue à Oujda. C'est incroyable, les propriétés terriennes en question ont été subtilement détournées au profit de nababs chérifiens dont l'un d'Oujda (Maroc oriental) informe sans ambages, Ahmed Belkheir, président d'association à Maghnia, très au fait de ce dossier. «L'expropriation a été officiellement avalisée lorsque nos autorités ont creusé ces fameuses tranchées sur le tracé frontalier pour lutter contre le trafic.Le hic, ces tranchées ont été inexplicablement reculées sur cette partie du territoire national, offrant automatiquement, sans le vouloir ou sans le savoir, des terres algériennes à des Marocains», explique notre interlocuteur. «C'est inespéré pour nos voisins, ils ne s'attendaient vraiment pas à cette générosité de notre part», dit Ahmed, sur un ton sarcastique mais le c?ur visiblement serré.Rachid Bouhassoune, héritier de terres à Ouled Mellouk, depuis des générations, précisément depuis 1928, confesse: «En voulant protéger mes biens, j'ai été agressé sur mes terres par un cultivateur marocain parce que, selon ce dernier, en creusant des fossés, l'Algérie a dessiné les frontières. Il m'a insulté, menacé et m'a cyniquement conseillé d'aller me plaindre auprès de nos responsables. Aujourd'hui, je n'ai pas le droit, non seulement de ne pas travailler mes terres, mais de ne pas fouler mon sol». Triste et dépité, Mohamed Mezouar abonde dans le même sens : «En procédant au creusement de ces fossés, nos terres ont changé de géographie comme par magie.Non seulement, une partie de notre propriété a été piétinée par ce projet de tranchées, mais une autre partie s'est retrouvée de l'autre côté, c'est incompréhensible et malheureux». Du côté de Roubane, dans la daïra de Béni Boussaïd (sud-ouest de la wilaya), deux familles, Maalouli et Souabi, ont perdu à elles seules 20 hectares. «Nous avons vu, impuissants, partir nos oliveraies et nos parcelles fertiles, sans qu'aucun nous vienne en aide. Nos doléances à tous les responsables de notre pays sont restées vaines.A qui se plaindre'» s'interrogent en colère les victimes de cette expropriation qui ne dit pas son nom. Des exploitations agricoles individuelles et collectives (EAI et EAC) gérées par trois autres familles dont Hamlili, au lieu-dit Djorf El Baroud, à Béni Ouassine, ont été également réduites comme une peau de chagrin par ces tranchées. Même conflit foncier dans la daïra de Bab El Assa (extrême-ouest de Tlemcen), à Khiassa (Chébikia, commune de Maghnia) et Boukanoune et dont les terres cultivables «perdues» sont inestimables.Propriétaires lésésEn 2005 et en 2007, une commission, composée d'experts en topographie, a été dépêchée d'un centre de planification de Bouzaréah (Alger) pour enquêter sur les lieux. «Sur nos terres alors, en 2007 -aujourd'hui appartenant aux Marocains- on nous avait rassurés en nous disant qu'on n'avait rien à craindre pour nos terres. Mais depuis, nos terres ont changé de nationalité», nous rappelle M. Belkheir, amer.Devant cette situation, qui paraît, aujourd'hui, inextricable, les propriétaires lésés ont saisi plusieurs autorités de l'Etat, en commençant par le procureur de la République et le président du tribunal de Maghnia (le 11 septembre 2013), le wali de Tlemcen, les responsables militaires de Tlemcen (le 11 et le 23 septembre 2013).Aucune réponse. Les seuls qui ont donné suite à ces plaintes, ce sont les services du Premier ministère qui ont répondu le 28 janvier 2014 à la requête des propriétaires transmise le 19 janvier de la même année avec ce contenu «je vous informe que les services du Premier ministre ont reçu votre requête, après étude, elle a été orientée aux services du ministère de l'Intérieur et des collectivités locales». Depuis, rien. Contacté, le président de l'APC de Maghnia (installé il y a moins d'une année de cela) s'est dit étonné par cette histoire: «Honnêtement, je n'en ai aucune idée».Au niveau des services des Domaines, on ne semble pas être non plus au courant de ce litige, même si en aparté, on ose avancer que ce problème est «militaire, diplomatique?» En longeant le tracé frontalier, nous avons confirmé les dires des plaignants, mais surtout, découvert certaines anomalies qui nous ont rendus à l'évidence. Le gouvernement de sa majesté a entamé l'érection d'un grillage de 3,50 m de hauteur, depuis Saïdia (qui fait face à Marsat Ben M'hidi l'algérienne).Bizarrement, une distance d'environ un kilomètre a été «omise» (pas de grillage) par le Makhzen sur le même endroit (Ouled Mellouk, Atamna) et en face, les tranchées creusées par l'armée algérienne ont été remblayées par des bras qu'on ignore. En fait, il s'agit là d'un espace ouvert aux vents et? aux trafiquants de tout bord.Et du coup, il n'est plus indispensable de s'interroger sur tous les produits prohibés inondant le territoire algérien dont 160 tonnes de résine de cannabis saisies en 9 moins par la douane et les différents services de sécurité algériens. Et ce n'est pas tout : en longeant le tracé frontalier, long de quelque 70 km (wilaya de Tlemcen) on a comptabilisé 25 «passages libres» entre les deux pays. Des ouvertures qui expliquent la «pérennisation» de la contrebande sur cette partie de la bande frontalière ouest.«Nous avons demandé une audience au commandant de la 2ème région militaire (Oran) pour attirer son attention sur cette situation inquiétante, parce que toutes les correspondances que nous avons transmis aux hautes autorités de l'Etat n'ont pas reçu de réponse, à l'exception des services de M. Sellal», indique MM. Belkheir et Bouhassoune. Dans ce magma de paradoxes sur le tracé frontalier, la route de «l'unité africaine» n'est pas prête d'être fermée.





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