Algérie - A la une


Le coût du kiwi
Le gouvernement a beau maquiller ses bilans comptables et afficher une fausse sérénité face aux menaces endogènes et exogènes sur la santé financière du pays, la réalité est bien têtue. L'Algérie court un sérieux risque de dilapider sa précieuse rente pétrolière, voire même son bas de laine placé dans les banques étrangères. Au rythme où vont les importations ? qui exploseront à hauteur de 60 milliards de dollars à la fin de l'année ? il est fort probable que les finances publiques entrent dans la zone rouge.Le premier argentier du pays, Mohamed Djellab, a déclaré à l'APN que la baisse des cours du brut n'est pas une «sérieuse menace». Un subtil euphémisme politicien, on s'en doute, qui cache (mal) tout de même une menace. Le ministre des Finances sait très bien qu'il n'est pas de bon ton, quand on est au service de Son Excellence, de placer son curseur dans la rubrique des annonces alarmantes.C'est là l'un des fondamentaux de la gouvernance bouteflikienne tout au long de ses trois mandats. Faire en sorte d'éviter les questions qui fâchent et les déclarations réalistes, quitte à se désavouer devant l'opinion. Il ne faut surtout pas mettre en berne le moral national par une petite inquiétude sur la santé financière du pays, ou encore une probable déprime des cours du pétrole. S'avancer sur ce terrain c'est, pour un ministre hardi, s'exposer ipso facto à la colère du maître du palais pour qui cela s'apparente à une attaque frontale.Tout le monde a vu comment le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, a été recadré dernièrement après s'être fendu, depuis Mostaganem, d'une déclaration alarmiste sur la chute des prix du pétrole. Le lendemain, il a dû dire exactement le contraire alors que la presse nationale avait rapporté fidèlement ses propos. Avant lui, Karim Djoudi a été plusieurs fois «corrigé» pour ses innombrables mises en garde contre l'explosion de la dépense publique.Il ne faudrait donc pas s'étonner de voir son successeur servir, dans quelques jours, un discours optimiste sur la conjoncture pétrolière et la stabilité des agrégats financiers de l'Algérie. C'est comme cela que fonctionne la gouvernance sous Bouteflika. Lancer des doux leurres pour faire croire que l'économie nationale est inatteignable et qu'elle ne peut être impactée ni par les caprices du marché pétrolier ni par la décrue de la production et encore moins par les secousses géopolitiques dans le voisinage.Toute cette gymnastique politique à laquelle se livrent nos ministres désabusés est destinée à poursuivre cette politique suicidaire d'importations massives de produits assez souvent inutiles ou de prestige. Pourquoi importer des kiwis, des ananas, des avocats et autres fruits exotiques pour 500 millions de dollars pendant que des Algériens fourrent le nez dans les poubelles 'C'est un constat simple que le citoyen lambda peut faire. Mais il s'interroge aussi sur l'insondable puissance de cette mafia de l'import-import qui contrôle le commerce extérieur. On comprend mieux pourquoi le gouvernement Sellal peine à éradiquer les marchands informels qui sont, tout compte fait, des «agents» en aval des puissants importateurs. C'est ici que le discours sur la rationalité économique perd tout son sens.


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